Compter les syllabes :
La versification est attachée au nombre des syllabes dans les vers. Il y a aussi la versification rythmique, qui dépend de la place des syllabes accentuées ou atones dans les vers. Deux difficultés portent sur l'e caduc et sur les Diérèses et synérèses. Les vers de mesure paire (6, 8, 10, 12 syllabes) ont été à peu près les seuls employés jusqu'aux révolutions poétiques du XIXe siècle.
Le "e" caduc:
Il compte toujours comme syllabe quand il est placé entre deux consonnes :
Quand Colette Colet colie 8
Elle le prend par le colet... 8
Eustache Deschamps
Il ne compte pas comme syllabe devant un mot commençant par une voyelle ou un h muet :
Voyons dans cet octosyllabe:
...
Pour contenter notre désir 8
Et satisfaire à notre attente 8
Ne faîtes qu'un demi-soupir 8
Et nous en ferons plus de trente. 8
Charles Cotin
L'e ne compte pas suivi des consonnes s, nt :
Tous les vices ont leur tanière, les exquis 10 Tous les vic'ont...
Et les hideux, dans ces déserts de pierres blanches... 12 ... de pierres blanch'
Paul Verlaine
L'e ne compte pas à la fin du vers:
Quand nous habitions tous ensemble 8 Quand nous habitions tous ensembl'
Sur nos collines d'autrefois, 8 Sur nos collines d'autrefois,
Où l'eau court, où le buisson tremble 8 Où l'eau court, où le buisson trembl'
Dans la maison qui touche aux bois... 8 Dans la maison qui touch' aux bois...
Victor Hugo
Dans le vers, l'e caduc, suivi des consonnes s, nt, compte cependant toujours pour une syllabe, même devant une voyelle ou un h muet
Les crépuscules blancs tiédissent sur mon crâne.
Mallarmé
Placé à l'intérieur d'un mot, entre une voyelle et une consonne, l'e caduc ne compte pas.
Je ne t'envierai pas ce beau titre d'honneur.
Corneille
Diérèses et synérèses:
Quand plusieurs voyelles se suivent dans un mot, il faut savoir combien elles forment de syllabes, car la diction du poème en dépend.
La prononciation en deux syllabes de deux voyelles côte à côte s'appelle une diérèse.
La prononciation en une syllabe de deux voyelles côte à côte s'appelle une synérèse.
C'est d'habitude le versificateur qui décide de la prononciation et non l'étymologie.
La césure :
C'est une coupure, un repos placé dans un vers après une syllabe accentuée.
...
Mais si quelqu'un venait /de la part de Cassandre; césure due au groupe fonctionnel
Ouvre lui tôt la porte, /et ne la fais attendre; césure due à la virgule et à la conjonction "et"
Soudain entre en ma chambre /et me viens accoutrer... césure due à la conjonction de coordination "et"
Pierre de Ronsard
Dans cet extrait d'un poème de Ronsard, les 3 alexandrins ont une césure entre la sixième et la septième syllabe: Chaque moitié du vers se nomme hémistiche.
L'hiatus :
Il se produit un hiatus quand deux voyelles, l'une finale, l'autre initiale se rencontrent. Ceci est surtout mal venu lorsqu'une voyelle rencontre une même voyelle:
Il se réveilla à l'aube.
J'ai évité la pluie.
Quand un mot commence par un h aspiré, il n'y a pas de hiatus.
Il me passa sa hache.
Finalement, il faudrait éviter l'hiatus qui choque l'oreille à la diction.
L'enjambement et le rejet :
Enjambement :
Une partie du vers suivant, comptant quelques mots est contenue dans le vers précédent :
Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme; l'espoir,
Vaincu, pleure, et l'angoisse atroce, despotique,
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.
Charles Baudelaire, Spleen
rejet :
Une partie du vers précédent (quelques mots) est contenue dans le vers suivant.
Le spectacle fini, la charmante inconnue
Se leva ; le cou blanc, l'épaule demi-nue
Se voilèrent; la main rentra dans le manchon.
Et, lorsque je la vis au seuil de sa maison
S'enfuir, je m'aperçus que je l'avais suivie.
Alfred de Musset
Le rejet ou l'enjambement permettent de mettre en valeur les mots les plus expressifs, les actions, les impressions importantes.
La rime :
A la fin d'au moins deux vers, les syllabes des derniers mots comportent un son commun.